« La gauche est à refaire »

Publié le par CM91

Chevènement au "Parisien" : « La gauche est à refaire »

 

Mercredi 29 août 2007.

Le Parisien : La gauche peut-elle se relever de sa défaite ?
Jean-Pierre Chevènement :
Je trouve d’abord peu élégant de taper à bras raccourcis sur une candidate qui a quand même fait 47% des voix, soit 17 millions de suffrages. Ségolène Royal a fait une campagne courageuse, elle a su résister victorieusement à l’offensive pro-Bayrou menée de l’intérieur même du PS par les Gracques, Michel Rocard, Bernard Kouchner et quelques autres. Il faut examiner sérieusement ce qui s’est passé : il n’est pas vrai que la candidate a été désignée par les sondages. C’est la crise interne du PS après le rejet de la constitution européenne le 29 mai 2005 qui lui a ouvert un boulevard en la mettant en meilleure situation que ses concurrents.


Faut-il réunir des assises de la gauche ?
La gauche est à refaire. Ce qui a manqué au PS en 2007, comme en 2002, c’est, outre une analyse solide de la globalisation, un projet à la fois original et crédible pour la France. La gauche doit à la fois assumer la nation et « penser mondial ». Le Mouvement républicain et citoyen (MRC), qui tiendra son université d’été les 8 et 9 septembre à Saint-Pol-sur-Mer (Nord), peut contribuer à redonner à la gauche ce logiciel puissant qui attirera vers elle les jeunes générations et lui permettra de reprendre pied dans les milieux populaires. Ce n’est pas le PS tel qu’il est, trop enlisé dans ses querelles de personnes, qui peut seul provoquer ce déclic. Il faut imaginer un nouvel Epinay (NDLR : le congrès fondateur du PS en 1971). Il y a place dans notre pays pour un grand parti de gauche républicain, progressiste, moderne. Ségolène Royal a dit, à juste raison, que c’était un effort de longue haleine.


Que retiendrez-vous des dix années de François Hollande à la tête du PS ?

Je regrette qu’il n’ait pas cherché à faire une synthèse anticipatrice avant même le référendum sur la constitution européenne entre ceux qui s’apprêtaient à dire non et ceux qui se rangeaient dans le camp du « oui ». Il a tout subordonné au maintien de l’unité d’un parti en fait profondément divisé sur le fond. Mais il mérite des circonstances atténuantes : la tâche était rendue très difficile par le poids de l’héritage.


Comment jugez-vous le volontarisme de Nicolas Sarkozy ?

Le président de la République mérite d’être jugé sur les actes. Chaque fois qu’il prend des mesures positives, soyons prêts à le reconnaître. Par exemple la gouvernance autonome des universités ou l’amélioration du crédit impôt-recherche sont de bonnes initiatives. D’autres mesures sont moins opportunes, comme les cadeaux fiscaux aux plus favorisés ou encore le voyage de Bernard Kouchner à Bagdad qui n’a pas été une réussite. L’occupation en permanence de la scène médiatique me parait dangereuse, grosse de dérapages.


Que pensez-vous de la candidature Dominique Strauss-Kahn au FMI ?

Je le jugerai lui aussi sur les actes.


La France s’aligne-t-elle sur les Etats-Unis ?
Ce que je crains dans la politique de Nicolas Sarkozy, c’est que, sous prétexte de ménager l’hyperpuissance américaine, il ne lui résiste pas quand il le faut. Nous sommes devant un chapelet de crises : le chaos au Moyen-Orient, l’Irak toujours occupé, l’évocation - à mon sens malheureuse - d’un « bombardement » de l’Iran, le ralentissement prévisible de l’économie mondiale, l’euro cher, conséquence de l’affaiblissement du dollar, etc. Or, le gouvernement n’anticipe pas : son budget repose sur une prévision de croissance à 2,5 %. En bien des domaines il risque d’être pris à contre-pied. A mon sens, la France n’a pas intérêt à donner le sentiment d’un alignement systématique sur les Etats-Unis

Publié dans Communiqué

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